Bag om La Question de l'isthme américain
Le 17 février 1858, par une tiède journée de printemps, j'attendais à midi, sur la jetée du port de Southampton, le petit bateau à vapeur qui devait me conduire à bord de l'Atrato, mouillé en pleine rade. J'allais enfin commencer, à travers des régions ignorées, un voyage aventureux dont la fantaisie américaine a presque fait un événement. J'allais chercher au fond de l'Amérique centrale la consécration d'un projet peut-être téméraire, sans trop m'attendre aux difficultés du lendemain. Préparé par plusieurs années d'études, obéissant à une vive sympathie pour les nationalités espagnoles, je croyais avoir désarmé d'avance toutes les hostilités politiques par le caractère éminemment libéral et conciliateur de mon programme. Tout souriait donc à ce début d'une lointaine pérégrination. J'étais heureux et confiant, parce que pour la première fois depuis bien des années je me sentais libre. J'avais d'ailleurs une foi profonde dans la puissance intrinsèque des grandes choses, de quelque part qu'elles viennent. Je m'embarquai, plein de pensées confuses, mais vivantes, impatient de quitter l'Europe pour courir à de plus larges horizons, et touchant déjà de la main ce monde nouveau où m'appelaient des pressentiments que la réalité devait encore dépasser...
Vis mere