Bag om Les torrents des Alpes
Pendant longtemps, les géologues expliquèrent par des mouvements convulsifs du sol la forme actuelle de notre planète. Les montagnes étaient de brusques soulèvements; l'affaissement qui y correspondait avait donné naissance aux bassins des lacs et des mers; les vallées étaient des fissures restées béantes lorsque l'écorce du globe s'était disloquée. Partout, dans la croûte solide de la terre, on voulait voir la trace de catastrophes plus ou moins récentes; tout au plus accordait-on aux intempéries atmosphériques et aux eaux courantes la puissance de niveler quelques bas-fonds, d'adoucir quelques pentes. Certains géologues novateurs, la plupart Anglais d'origine, ont répudié ces vieilles doctrines en ces dernières années. A la théorie du catastrophisme, seule admise jusqu'alors, ils ont substitué la doctrine de l'uniformisme, qui consiste en ceci, que les phénomènes sont dus, sauf des variations d'intensité, aux forces encore actives de nos jours. Plus de soulèvements subits, mais de lentes oscillations dont l'effet n'est bien sensible qu'après des milliers ou des millions d'années; - des mers dont le sol s'enfonce ou se relève imperceptiblement chaque siècle, des vallées que les glaciers et les torrents creusent et nivellent petit à petit par érosion, des plaines de gravier et des deltas sablonneux auxquels l'eau courante apporte chaque jour un léger surcroît de matériaux arrachés à la montagne, - telle serait l'histoire du globe éternellement modifié sur lequel nous vivons...
Vis mere