Bag om Darwin et ses critiques
" ... Les critiques de Darwin appartiennent à deux classes. - Nous y distinguerons les philosophes et les naturalistes. Nous ne sommes pas de ceux qui pensent que la science doive rester absolument indifférente aux remarques de la philosophie. Celle-ci n'a, il est vrai, aucune prise sur ces sciences achevées et parfaites qui se nomment les sciences mathématiques: là tout est certain, précis, soustrait au doute, à l'interprétation; mais, sitôt qu'on pénètre dans le domaine des réalités physiques, l'interprétation devient nécessaire. La vérité ne s'y présente plus sous des traits immuables, elle a une sorte de croissance, comme les oeuvres vivantes elles-mêmes. Il n'y a rien à changer aux oeuvres d'Euclide, aux théorèmes de l'algèbre; il y a toujours quelque chose à modifier aux conceptions que nous nous formons des phénomènes matériels, surtout s'il s'agit de cette catégorie de phénomènes que gouvernent les lois mystérieuses de la vie. On fait de temps à autre des découvertes dans les sciences tout idéales qu'on nomme assez faussement les sciences positives; mais ces découvertes ne modifient en rien celles du passé. Chaque découverte physique ou physiologique au contraire colore d'une lumière nouvelle toute la science de la matière animée. Les problèmes éternels qui se cachent derrière les phénomènes sont aujourd'hui ce qu'ils ont toujours été. La géologie plante des jalons dans l'effrayante longueur des temps antéhistoriques; mais ces distances, si énormes qu'elles soient, s'évanouissent devant la simple notion de l'infini. L'astronomie jette sa sonde de plus en plus loin dans le ciel, mais peut-elle aller jamais aussi loin que la pensée ? La physique voit aujourd'hui dans la lumière, dans la chaleur, dans le magnétisme, dans l'affinité, dans la gravité, les jeux d'une même force soumise à d'éternelles métamorphoses; mais que sait-elle sur la force même et sur la cause du mouvement ? ..."
Vis mere