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Les passionnées - Rene Maizeroy - Bog

Bag om Les passionnées

... Où diable l'avais-je rencontrée cette petite Mad qui se prélassait avec de telles paresses sur le large divan couvert d'une peau d'ours et chantonnant du bout des lèvres, parmi la fumée blonde des cigarettes, un air lent et doux, un air d'adieu, presque sans rythme ? Où avais-je vu l'arc vibrant de ses lèvres si rouges qu'elles semblaient éclaboussées par le sang giclé d'une blessure, ce corps souple aux lignes enfantines, ces cheveux d'un blond incertain et surtout le regard cruel, dédaigneux, despotique qui filtrait entre les paupières comme du soleil réverbéré par un glacier ? Où avais-je entendu sa voix traînante auquel un vague accent étranger ajoutait l'on ne savait quoi d'ironique et de suggestif ? Et des noms d'amies prononcés coup sur coup, des évocations de l'hiver passant et repassant dans une parlotte brusque m'expliquaient l'énigme, me rappelaient une de ces histoires parisiennes qui pendant deux jours servent de thème à toutes les conversations, que l'on chuchote à mi-voix, que l'on commente avec des sous-entendus gouailleurs et qu'un nouveau scandale, un potin inédit remplace bientôt sur l'affiche. Je la reconnaissais maintenant. Nous avions flirté et valsé ensemble chez Lady Stockewell, à l'ambassade de Thuringe, chez la princesse Maravillas, partout où l'on s'amuse. Elle était mariée. Mariée à dix-huit ans et son mari l'adorait à deux genoux comme une idole, vivait dans le rêve de ses caprices, dans l'attente de ses désirs, dans l'éblouissement de sa beauté. Il ne pensait qu'à elle. Il en était jaloux à en être parfois comme halluciné. Il serait mort plutôt que de lui voler une parcelle de son coeur, d'échapper un instant à son influence, à son autorité. Il lui laissait la bride sur le cou. Il obéissait comme s'il eût été le plus faible. Il n'écoutait aucun conseil. ... O folie d'amour pire que toutes les folies, démence absurde qui brise les plus fiers courages, qui annihile les plus rudes volontés, prologue de tant de drames navrants, de tant d'abdications humiliantes, de tant de déchéances ! O folie de donner tout son être à celles dont le coeur n'est pas sûr, dont le cerveau vire et vole à la moindre des tentations comme les ailes d'un moulin au moindre vent; de ne pas les mener comme des bêtes indociles, de ne pas demeurer le mâle inflexible, impérieux, le maître absolu sous lequel on se plie, le dompteur dont on craint les colères, dont on caresse les mains fortes, dont on cherche câlinement le regard ! O folie de croire que le bonheur n'est pas une dérisoire chimère et peut durer, qu'on ne subira pas le sort commun, qu'on ne succombera pas dans cette lutte inégale de l'homme et de la femme ! L'un ou l'autre. Toujours. Qui donc est heureux ? Qui est arrivé au terme sans avoir maudit plus de vingt fois son lot amer, montré le poing au ciel, sangloté comme les tout petits, regretté les belles illusions, les radieuses minutes des premières joies si vite évanouies ? Les passionnées, extrait.

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  • Sprog:
  • Fransk
  • ISBN:
  • 9781505628890
  • Indbinding:
  • Paperback
  • Sideantal:
  • 158
  • Udgivet:
  • 26. januar 2015
  • Størrelse:
  • 127x203x9 mm.
  • Vægt:
  • 163 g.
  • 2-3 uger.
  • 13. december 2024
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Beskrivelse af Les passionnées

... Où diable l'avais-je rencontrée cette petite Mad qui se prélassait avec de telles paresses sur le large divan couvert d'une peau d'ours et chantonnant du bout des lèvres, parmi la fumée blonde des cigarettes, un air lent et doux, un air d'adieu, presque sans rythme ? Où avais-je vu l'arc vibrant de ses lèvres si rouges qu'elles semblaient éclaboussées par le sang giclé d'une blessure, ce corps souple aux lignes enfantines, ces cheveux d'un blond incertain et surtout le regard cruel, dédaigneux, despotique qui filtrait entre les paupières comme du soleil réverbéré par un glacier ? Où avais-je entendu sa voix traînante auquel un vague accent étranger ajoutait l'on ne savait quoi d'ironique et de suggestif ? Et des noms d'amies prononcés coup sur coup, des évocations de l'hiver passant et repassant dans une parlotte brusque m'expliquaient l'énigme, me rappelaient une de ces histoires parisiennes qui pendant deux jours servent de thème à toutes les conversations, que l'on chuchote à mi-voix, que l'on commente avec des sous-entendus gouailleurs et qu'un nouveau scandale, un potin inédit remplace bientôt sur l'affiche. Je la reconnaissais maintenant. Nous avions flirté et valsé ensemble chez Lady Stockewell, à l'ambassade de Thuringe, chez la princesse Maravillas, partout où l'on s'amuse. Elle était mariée. Mariée à dix-huit ans et son mari l'adorait à deux genoux comme une idole, vivait dans le rêve de ses caprices, dans l'attente de ses désirs, dans l'éblouissement de sa beauté. Il ne pensait qu'à elle. Il en était jaloux à en être parfois comme halluciné. Il serait mort plutôt que de lui voler une parcelle de son coeur, d'échapper un instant à son influence, à son autorité. Il lui laissait la bride sur le cou. Il obéissait comme s'il eût été le plus faible. Il n'écoutait aucun conseil. ... O folie d'amour pire que toutes les folies, démence absurde qui brise les plus fiers courages, qui annihile les plus rudes volontés, prologue de tant de drames navrants, de tant d'abdications humiliantes, de tant de déchéances ! O folie de donner tout son être à celles dont le coeur n'est pas sûr, dont le cerveau vire et vole à la moindre des tentations comme les ailes d'un moulin au moindre vent; de ne pas les mener comme des bêtes indociles, de ne pas demeurer le mâle inflexible, impérieux, le maître absolu sous lequel on se plie, le dompteur dont on craint les colères, dont on caresse les mains fortes, dont on cherche câlinement le regard ! O folie de croire que le bonheur n'est pas une dérisoire chimère et peut durer, qu'on ne subira pas le sort commun, qu'on ne succombera pas dans cette lutte inégale de l'homme et de la femme ! L'un ou l'autre. Toujours. Qui donc est heureux ? Qui est arrivé au terme sans avoir maudit plus de vingt fois son lot amer, montré le poing au ciel, sangloté comme les tout petits, regretté les belles illusions, les radieuses minutes des premières joies si vite évanouies ? Les passionnées, extrait.

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