Bag om L'Abyssinie en 1868
" Nos lecteurs n'ont peut-être pas oublié le tableau que nous avons tracé, il y a trois ans, des événements qui avaient signalé à l'attention de l'Europe le pays semi-légendaire de l'Abyssinie. Dans ces rapides esquisses, nous exposions les origines d'un conflit qui ne semblait pas alors appelé à prendre les graves proportions qu'il a aujourd'hui. Quels que fussent les motifs réels de l'arrestation arbitraire du consul anglais, M. Duncan Cameron, il paraissait improbable que Théodore II, avec l'intelligence supérieure qu'on ne peut lui contester, songeât sérieusement à provoquer une lutte où il n'avait rien à gagner, et où ses puissants ennemis pouvaient compter sur le concours de la moitié de l'Abyssinie, insurgée depuis plus de cinq ans. Cependant l'improbable s'est réalisé aux premières provocations du roi des rois est venu s'ajouter le fait plus grave de l'arrestation, sans motif connu, de la mission anglaise chargée de négocier la délivrance des captifs. Après de légitimes hésitations, le gouvernement britannique a dû prendre la responsabilité d'affronter les chances d'une expédition dispendieuse et lointaine. L'honneur de l'Angleterre, la nécessité de rétablir son prestige compromis en Orient par la longue impunité de l'agresseur, exigeaient cet effort. Ne soyons pas trop surpris si cette expédition excite chez nos voisins une émotion qui peut nous sembler excessive, à ne considérer que l'importance matérielle du conflit et le chiffre des forces engagées. S'il s'agissait de châtier quelques-uns des sauvages tyranneaux de l'Himalaya ou de l'Afghanistan, l'Angleterre y emploierait autant d'hommes et de millions qu'elle en aventure en ce moment sur le plateau abyssin; mais on peut hardiment affirmer que le public anglais ne prêterait pas aux bulletins d'une pareille guerre une attention aussi vive qu'aux télégrammes qui lui arrivent en ce moment de Sanafé..."
Vis mere